Cosmogonie et Mythologie Dogon

Cosmogonie  et  Mythes Dogons

Le territoire dogon, appelé “pays dogon”, demeure un site exceptionnel, habité par des êtres dont les traditions et les masques fascinent, mais il est aussi devenu une destination touristique de premier ordre et une sorte d’utopie folklorique (3).
Je suis du reste passé en pays dogon, lors d’un merveilleux voyage au Mali en aout 1997

La cosmologie Dogon 
Avant toute chose était amma (etre suprême) et il ne reposait sur rien. l'oeuf en boule d'amma était clos mais fait de quatre parties, dites "clavicules" ; elles-mêmes ovoïdes et comme soudées les unes aux autres. En vérité les quatres clavicules étaient la préfiguration des quartes éléments : l'eau (dji), l'air (ono), le feu (yau) et la terre (minne).
Amma commença par tracer en lui-même le plan du monde et de son extension, sous forme de 266 signes ou "paroles", classées en 22 catégories et connotant tous les êtres et les choses qui devaient être ensuite réalisés dans la matière.
Amma créa un premier monde, amma décida de créer un autre monde ayant pour base l'homme et formé selon une technique de mélange et de brassage des quartes éléments, amma entreprit donc de dessiner un nouveau plan de création.
En brassant les quartes éléments, amma provoqua à l'intérieur de la graine de "po" l'apparition de sept vibrations. Conçu comme la somme de trois (chiffre masculin) et de quatre (chiffre féminin), le nombre sept affecté aux vibrations faisait ressortir la structure fondamentale de l'être, commune à Dieu et à ses créatures, à savoir une union gémellaire entre la masculinité et la féminité.
Amma créa ensuite les autres céréales et d'abord les huit principales d'entre elles, comme témoins de la fécondité et de la capacité de reproduction (ou parole) placées dans le "po". Elles préfigurent les huit ancêtres primordiaux des tribus dogons.
Après la formation des graines, amma créa, au sein du même "po" et sous forme de poissons silures (anagonno), les premiers êtres proprement vivants. Appelés nommo anagonno, ces silures célestes furent les prototypes de l'homme.
Amma entreprit de façonner quatre couples de jumeaux mixtes :
- les deux jumeaux mâles du placenta du haut, qui portent respectivement les noms de nommo diè (grand nommo) et de nommo titiyyayne (messager du nommo), resteront au ciel auprès d'amma. Le premier, en tant  que "régisseur" du ciel-atmosphère, sera son grand prêtre ; quant au second, il sera comme l'exécuteur des hautes œuvres du premier et, à ce titre, son sacrificateur.
- à l'un des jumeaux mâles du placenta du bas, on donnera l'appellation de nommo semi (nommo sacrifié) appelé ogo sous sa forme de nommo anagonno, le quatrième jumeau sera le futur "renard pâle", a la différence des trois autres, il ne sera jamais représenté comme poisson car,  avant même d'avoir atteint son achèvement, il bousculera de fond en comble le plan d'amma.
ogo manifesta son impatience  pendant que amma créa a "jumelle". ogo se révolta  et se mit en quête sans attendre les réalisations de amma.
ogo bouleversa toutes les règles, se mit alors en mouvement dans l'intention de surprendre les secrets de l'univers en formation.
ogo guettait les semences d'amma, pour s'en emparer, les utiliser à son profit et être fécond comme son créateur. ogo voulait voir la création d'amma et connaitre ses secrets.
Après la formation de la terre étant le placenta de ogo, ce dernier en pénétrant dans la terre, matière de son placenta, s'unissait avec sa mère et, par là, commettait un acte d'une telle gravité qu'il allait continuer  largement à compromettre l'ordre du monde.
ogo par cette union engendra des êtres appelés yeban  qui naquirent incomplets et incestueux  comme leur père ogo, les yeban engendrèrent par la suite les êtres appelés antoumboulou.
Pour y remédier de l'accumulation des fautes d'ogo, amma pensa d'abord à une troisième création mais amma décida de purifier cette deuxième création.
amma décida de sacrifié le frère jumeau d'ogo appelé nommo semi étant lui même pur.
amma désigna comme sacrificateur le nommo titiyayne (messager du nommo),
Mais nommo titiyayne veillait et alors ogo s'enfuyait  vers la terre, il lui trancha le prépuce avec les dents tombant sur le placenta du nommo sacrifié (nommo semi), le sang de la circoncision d'ogo donnera naissance à la planète mars.
Un nouveau destin commence alors pour ogo car à peine a-t-il atterri sur la terre, amma le transforma en yurugu (le renard pâle).
Après avoir pétri le nommo semi après son sacrifice, amma pétrit aussi avec la matière du placenta les premiers ancêtres des hommes : quatre jumeaux mâles et leurs quatre jumelles. appelés unum (fils du nommo), ils sont aussi connus ous les noms : amma serou et sa jumelle go sa ; lebe serou, binou serou, dyongou serou et leurs jumelles : ya sa.
Les unum furent d'abord créés sous la formes de poissons silures, forme qui sera également celles des hommes actuels au stade du fœtal.
Puis l'arche d'amma se posa de nuit sur la terre après nommo, tous les êtres qui se trouvaient dans l'arche descendirent successivement (les animaux domestiques, les animaux sauvages, les oiseaux, les poissons, les hommes, les plantes, les céréales).  c'est alors que les hommes assistèrent au premier lever du soleil. Ce dernier sortir à l'est et éclaira l'univers jusqu'alors plongé dans une totale obscurité.
Puis l'humanité se développa et la vie s'organisa sur la terre selon les instructions du grand nommo : nommo die et de son sacrificateur nommo titiyayne. C’est le nommo semi avec sa jumelle qui vint plus tard instruire les hommes de la terre.
la bukongo parle aussi du elima olongo qui en vérité est le ogo des dogons qui bouleversa l'ordre de l'univers.
Dans la tradition égyptienne, nommo semi est appelé ousir (osiris) et ogo est associé à seth ...
Le sacrifice d'osiris est celui du nommo semi ....quand à seth associé à un "renard" il est associé aux désordres.
Même chez les navajo peuple indien il parle du dieu noir et aussi de ses démêlés avec un coyotte (cousin du renard)...ingeta !

La cosmologie  Dogon détaillée par des ethnologues  

« 
...Les dogons ont développé des points de vue qui ne sont pas, dans leur ensemble, démentis par la science contemporaine. C’est dire toute la rationalité de cette cosmogonie dogon qui contient encore d’autres faits plus éblouissants encore relatifs à la connaissance des corps célestes... » (C. A Diop, volney et le sphinx de T. Obenga professeur de langue égyptienne et d’histoire ancienne Editions Présence Africaine p.171)

« Pour les dogons il y a pluralité des mondes, des univers stellaires à l’infini, bref une infinité de mondes ». (C. A Diop, volney et le sphinx de T. Obenga Edit. Présence Africaine p.156)

"Il y a donc une prolifération de la vie sur la pluralité des mondes. Nous les hommes nous sommes sur la 4ème terre. Les formes exactes, les aspects concrets de la vie sur les autres mondes ne sont pas connus, et les dogon d’imaginer des "hommes à cornes" sur la 3ème terre, des "hommes à queue" sur la 5ème, des "hommes ailés " sur la 6ème terre, des "hommes rampants" sur la 7ème terre, etc." (C.A Diop, Volney et le sphinx de T. Obenga Edit. Présence Africaine p.156)

"Ainsi, à partir des choses plus petites qui sont contenues dans la chose la plus petite mise en exposition par un mouvement tourbillonnant et rayonnant (qui est le Démiurge lui même), l’Univers créé va s’étendre constamment (expansion de l’Univers), les êtres(humains, animaux, végétaux, etc.) vont se multiplier et peupler les mondes qui seront innombrables (pluralité des mondes).Les particules (signes d’Amma) vont aussi proliférer, pour réaliser toutes les choses qui formeront toujours l’Univers." (C. A Diop, volney et le sphinx de T .Obenga Edit. Présence Africaine p.159)

"La cosmologie dogon est peut-être vieille d’environ 700 ans jouissant ainsi d’une longue tradition.

Les dogons ont élaboré leur cosmogonie au niveau même de l’immensité et de l’infinité du cosmos, avec les connaissances suivantes :

- L’univers est hiérarchisé et tournoie ;

-Notre Galaxie (la voie lactée) est une galaxie spiral, en forme de disque en rotation autour de son axe ;

-Les étoiles et les constellations sont innombrables : le chiffre démiurgique 266 signifie précisément qu’il s’agit de phénomènes cosmiques qui comptent par milliards ;

-La voie lactée forme l’Amas galactique local : ce que les dogons appellent "système stellaire externe" où se trouvent cependant le soleil et la terre ;

-Le système solaire est désigné par "système stellaire externe " : le soleil ayant une influence directe sur la vie de la terre ;

-La terre n’est donc pas au Centre de l’Univers puisqu’elle appartient au système solaire et à l’ensemble galactique de l’Amas local (système externe d’astres en spirale) ;

-Quatre (4) étoiles formes la croix du sud qui indique la direction du pôle céleste austral, -l’une des directions spatiales essentielles. La Polaires indique la direction du pôle Nord ;

-Les étoiles (visibles et invisibles) qui emplissent l’Univers se meuvent selon leurs orbites respectives, et forment d’immenses champs stellaires, galactiques ;
-La vie sur terre dépend du Soleil, directement ;

-La spirale, le cercle, la fourche (l’axe de rotation), le mouvement des étoiles, des systèmes stellaires, de la terre, etc., interviennent dans la compréhension dogon de l’Univers en sa globalité, en sa structure, en ses éléments cosmiques ;

-L’homme est indissociable du cosmos, puisque la Terre qui le porte est elle-même partie intégrante du système solaire et de l’ensemble galactique ;

-Le cosmos est certes "infini" mais "mesurable", donc connaissable par la raison et l’intuition humaines.

Aucune de ces idées essentielles de la cosmologie dogon n’est contredite par l’astronomie moderne..." (C. A Diop, Volney et le sphinx de T. Obenga Edit. Présence Africaine p.169)

SOURCES / DATATION  ET  CONTEXTUALISATION

L’école d’ethnologie française, dirigée par Marcel Griaule, se passionne pour ce peuple d’agriculteurs dont les traditions révèlent une culture complexe. Toute une génération d’ethnologues et d’écrivains se forme dans le sillage de Griaule au cours de plusieurs missions : Germaine Dieterlen, Denise Paume, Solange de Ganay, André Schaeffner ou encore Michel Leiris (2). Les ethnologues, aidés de leurs informateurs, recueillent des mythes auprès des vieux sages, assistent à des sorties de masques, etc. Ces observations donneront lieu à de nombreuses publications scientifiques, et à la diffusion de reproductions de masques et de mythes romancés auprès du grand public.

Cette cosmologie est principalement basée sur une sélection raisonnée de travaux de Marcel Griaule (1898-1956).
Il convient de distinguer deux périodes de collectes d’informations et de publications chez Griaule : 1/ Les années 1930, avec Masques Dogons qui demeure un ouvrage de référence. 2/ Les années 1950, avec Dieu d’eau et Le Renard pâle. Ces deux derniers ouvrages sont basés sur des entretiens réalisés avec un vieux sage Dogon appelé Ogotemmêli. Cette dernière période a été critiquée par les exégèses d’anthropologues modernes (voir retour sur la critique des anthropologues).

• Source principale : Masques Dogons (1938). Au début de cet ouvrage consacré à la symbolique et l’usage des masques, de précieuses informations sur la cosmogonie, la structure et la description du système du monde sont présentées. Ces informations correspondent à une enquête de terrain menées au début des années 1930. Il ne contient que très peu d’informations sur les astres et l’observation du ciel.

• Source secondaire : Le Renard pâle (1965). Les mythes ont été collectés au cours d’une enquête qui remonte à 1954. Le Renard pâle est avant tout un très long exposé cosmogonique qui contient de nombreux mythes relatifs aux astres. Mais ces informations sont à prendre avec précaution. Il est possible de les utiliser à condition de mentionner leurs critiques.
En revanche, j’ai exclu le fameux Dieu d’eau : non seulement la source du livre est la même que Renard Pâle (les entretiens avec Ogotemmêli, le recours aux mêmes informateurs et traducteurs), mais en plus les informations recueillies sont romancées, donc déformées par un dispositif littéraire qui sort du champ d’étude anthropologique approprié pour ce genre d’étude.

• Autre source : L’éclairage et la critique des anthropologues modernes
A partir des années 1970, des anthropologues passent au crible l’œuvre de Griaule, ils lui reprochent de ne pas maîtriser la langue du peuple étudié, de passer par des traducteurs (Ambara et Amadingué) dont la fiabilité serait douteuse, de recourir à des méthodes “judiciaire” et “militaire”, de trop s’intéresser à la numérologie et au symbolisme. Pour Walter van Beek, l’auteur le plus critique, les entretiens d’Ogotemmêli sont une “fiction interculturelle” (4).
Pour mieux comprendre ces travaux, rappelons plusieurs points importants de contextualisation :
- Marcel Griaule est un homme de son temps, une époque où l’Afrique est marquée par le phénomène colonial.
- L’ethnologue français avait un “projet” visant à réhabiliter la culture africaine. Dans la revue Psychée en 1947, il écrit : “Il convient de dire à l’Européen, comme à l’Américain, que les temps sont révolus où ils pouvaient se croire les rois du monde et où ils tenaient dans une affection condescendante ou dans un mépris souverain les peuples conquis en vertu du droit du plus civilisé, du plus fort.” (5).
- L’ethnologie est devenue anthropologie. Les sciences humaines évoluent au gré des époques et des idéologies, l’analyse du fait social a remplacé l’étude du champ religieux et du symbolique, au point que les anthropologue des années 1970-80-90 se sont désintéressés des cosmologies traditionnelles. Mais depuis quelques temps, l’étude du religieux revient sous d’autres formes, etc.

• Le problème de la récupération par des ufologues 
Malheureusement, les informations concernant Sirius et le mythe de l’arche du Nommo ont été récupérées par des ufologues (6) peu soucieux de méthodes scientifiques, semant davantage le trouble dans cette compréhension de l’œuvre de Griaule. Ces interprétations n’ont pas lieu d’être dans la présentation de l’observation du ciel chez les Dogons.

QUELQUES CARACTERISTIQUES
• Une tradition orale
Cette cosmologie est une tradition orale rapportée par des anthropologues aidés de traducteurs/informateurs. Comme dans de nombreux autres contextes culturels où ce genre de méthode est utilisée, il ne faut pas chercher de tradition “authentique”, “vraie”, mais disons que cette vision du monde “tend” à rendre compte d’une tradition.  De plus, cette tradition mélange des mythes et des observations concrètes de l’environnement, notamment des phénomènes célestes et des mouvements des astres. Les informations qui résultent de ce mélange peuvent paraître fantaisistes, contradictoires aux yeux de la logique moderne, mais elles relèvent d’un mode de transmission opératoire qui est fréquent lorsqu’on décortique des cosmologies dites “traditionnelles” : il se caractérise par le “bricolage” (7).
• Un savoir réservé à quelques individus : les Hogons
Ce n’est pas la vision d’un peuple dont il est question mais celle d’un groupe d’individus, en l’occurrence les Hogons, hauts dignitaires religieux, vieux sages, membres de confréries initiatiques fermées, gardiens des traditions.
• Des influences exogènes
Les cosmologies “bricolent” des savoirs complexes en superposant des informations issues de divers registres mais aussi diverses sources, certaines sont liées à une tradition transmise dans la communauté, d’autres sont des emprunts réalisés à d’autres cosmologies, en l’occurrence souvent issues de cultures dominantes ou omniprésentes. On peut ainsi parler de phénomènes d’acculturation.
Chez les Dogons, on suppose des influences extérieures plurielles :
- La cosmologie musulmane : Comme dans de nombreuses cosmologies subsahariennes (comme les Banman ou les Fulbe voisins), la cosmologie musulmane a influencé les cosmologies traditionnelles (8). Quelques indices vont dans ce sens : le nombre de ciels (importance du chiffre 7), le modèle en étages correspondent au “Récit de l’échelle de Mahomet”
- Le récit de la Genèse : La cosmogonie dogon de Masques dogons mentionne des éléments qui évoquent la Genèse :  une creation ex-nihilo, un premier couple humain (Adama et Awa)    etc.
- Des échanges avec des missionnaires : des échanges sont attestés au début des années 1930 à Sanga. Il est donc est posible que des missionnaires aient pu transmettre des informations relatives au ciel aux Dogons , des éléments totalement absents des périodes d’investigation d’avant-guerre : Sirius et ses compagnons, les satellites de Jupiter, le motif en spirale des mondes, etc.
- Des traditions d’ethnies proches : certains mythes dogons sont des emprunts à des mythes d’ethnies voisines, comme les Mossis, les Bozos, les Songhaïs. Ces histoires peuvent être racontées en public, on les appelle êwênê,  La trace de ces emprunts peut s’accentuer selon les informateurs.
L’accumulation de races d’emprunts à des récits étrangers mettent à mal la prétendue authenticité des mythes dogons.

COSMOGONIE
Les mythes qui racontent la création du monde contiennent souvent des informations sur la terre, le ciel, les astres, etc. Chez les Dogons, le récit cosmogonique  occupe une place très importante dans la mythologie rapportée par l’école française d’ethnologie. Marcel Griaule et Germaine Dieterlen en décrivent les étapes dans des centaines de pages, dont certaines sont particulièrement ésotériques. Entre Masques Dogons et Le Renard pâle, on remarque deux cosmogonies apparemment très différentes, le récit d’avant guerre est sommaire tandis que celui d’après-guerre est long et d’une grande complexité. Dans Le Renard pâle de nombreux détails sont donnés sur les astres, Sirius et ses compagnons, etc.
Pour le mythe cosmogonique, en tant que récit, nous proposons de nous limiter au mythe le plus authentique, le moins critiqué par les anthropologues modernes, à savoir celui présenté dans Masques Dogons.

 Source principale : Masques dogons
- Création du monde :  Amma créé le ciel, la terre, l’eau et le génie Nommo. 14 terres et 14 ciels sont empilés. Il fait descendre le génie sur la terre sur une arche par le chemin de l’arc-en-ciel. Il crée des êtres immortels : le caméléon, la  tortue, les esprits Yeban (des rochers), les arbres, les plantes, le lézard, les rapaces, la tourterelle, le lion, l’hyène, la panthère, le hibou. Puis il créé l’homme et la femme (“selon certains informateurs, l’homme s’appelait Adama et la femme Hawa“). En ce temps-là les humains étaient aussi immortels, leur âme pouvait quitter leur corps pour se rendre dans le monde des génies Yeban. Leur corps pouvait se transformer en grand serpent pour les rejoindre.
- Destruction du premier monde : La Terre et le Ciel des humains se sont mis à se quereller, la Terre prétendit être la plus vieille, provoquant la fureur de l’Amma du monde d’en bas (Il y a un Amma par monde, celui du bas est le plus vieux et le plus puissant.). Amma renversa le poteau du bas, faisant tomber le ciel sur la terre, et chaque Amma l’imita, si bien que tous les êtres furent broyés. Les seuls épargnés furent les vieilards transformés en serpents et les esprits Yeban.
- Reconstruction : “La Terre reconnut que le Ciel était le plus fort”. Les Amma de chaque monde redressèrent l’édifice mais le ciel était si bas que les nouveaux hommes (Andoumboulou) ne pouvaient pas grandir.
- La lune griffée : “La lune était alors comme un miroir fraîchement formé de matière molle. L’hyène, l’ayant trouvée belle, voulut la toucher de sa griffe et laissa au centre une empreinte, car l’astre était encore chaud”.
- Les étoiles sont des jouets : “A cette époque, les femmes prenaient les étoiles pour les donner aux enfants.” Puis les femmes remettaient les jouets à leur place.
- Le ciel est trop bas : Le soleil était si proche de la Terre qu’il brûlait les hommes et le ciel si bas qu’il gênait les femmes lorsqu’elles utilisaient leur pilon. C’est une vieille qui repoussa le Ciel avec son pilon à la place qu’il occupe aujourd’hui. Les hommes purent enfin grandir…
(Étapes intermédiaires : invention du feu par le forgeron, invention de l’agriculture, domestication des animaux.)
- Nouvelle querelle de la Terre et du Ciel : La Terre déclare être plus grande que le Ciel, provoquant à nouveau la colère d’Amma. Il monta au Ciel et empêcha la pluie de tomber. Grâce aux coups du forgeron, aux tambours d’un cordonnier, qui vénéraient Amma celui-ci redscendit sur terre et fit tomber la pluie. “Amma est grand, la terre est petite”.
(Étapes finales : découverte des fibres par une femme, apparition de la mort, invention du Sigui, etc.).

SYSTEME DU MONDE
Dans Masques Dogons, dès la deuxième page du mythe cosmogonique, un système du monde est en marche, une représentation est donnée, un schéma est même utilisé en marge du récit. On ne retrouve pas cette approche dans les ouvrages d’après-guerre, la tentation de donner à voir un système complet a été remplacée par une profusion détails sur les objets célestes.
Alors que Masques Dogons demeure notre source principale, nous avons cru bon de mentionner les indices cosmologiques présents dans Le Renard pâle, à titre d’indication. On décèle quelques convergences comme la structure du monde basée sur le chiffre 7, l’archétype du système du monde figuré par un cercle traversé par un axe aux extrémités évasées. Mais aussi des divergences comme sur le mouvement de la terre, ou le rôle de spirale.

• Source principale : Masques dogons 
- une terre circulaire entourée par un serpent : “La terre ronde et plate, entourée d’une grande étendue d’eau nęn di, eau de sel, en forme de couronne. Cette mer elle-même est encerclée par un immense serpent, yuguru na, qui maintient l’ensemble en se mordant la queue. S’il venait à lâcher prise, tout s’effondrererait. “
- l’axe du monde : “Au centre de la terre, au nord des falaises, s’élève un poteau de fer, amma dyĩ (…). Il monte jusqu’à une autre terre qu’il soutient sans la traverser et qui se trouve au-dessus du ciel visible (…).” Ce poteau a une forme évasée aux extrémités.
- les 14 mondes : “La terre du dessus est comparable à celle où sont les hommes. Sept disques s’étagent ainsi vers le haut. D’autres part, la terre des hommes est la première d’une série de sept qui s’étagent en dessous.”.
- mouvement : “pour chaque disque, il existe un soleil et une lune ; le soleil est au-dessus des confins de la terre dont il n’éclaire qu’une partie, comme une lampe. Il est immobile, tandis que le disque tourne en un jour autour de son pivot de fer. Ainsi, tous les pays sont tour à tour éclairés.” (note : “pour un observateur placé sur terre= la terre tourne dans le sens des aiguilles d’une montre”).
• Complément : Anecdote rapportée par Michel Leiris 
- terre plate : Michel Leiris, qui a participé à la découverte des Dogons au cours de la fameuse expédition Dakar-Djibouti rapporte un épisode intéressant sur Ambara, un informateur de Griaule : “Ce matin, il  racontait à Griaule que, lorsque lui et ses camarades de l’école avaient dit, après une leçon de cosmographie, aux vieux que la terre était ronde, ils avaient été battus”. ce qui suppose que les Hogons croyaient que la terre est plate.
• Complément contradictoire : Le Renard Pâle 
- terre :“la terre se trouve dans un “monde d’étoiles en spirale”.
- axe : le monde d’étoiles en spirale de la terre tourne autour d’une axe qui relie la polaire à la Croix du Sud.
- mouvement des étoiles : “Les étoiles tournent dans le ciel. Les étoiles sont le signes inconnus d’Amma qui tournent dans le ciel”.
- double mouvement de la terre : “La terre tourne sur elle-même et parcourt d’autres part un grand cercle, adun
ǫ igili “cercle du monde”, comme une toupie dont la rotation est accompagnée d’un mouvement circulaire”.

DESCRIPTION DES ASTRES
Il y a un grand déséquilibre entre Masques Dogons et Le Renard Pâle dans les mythes et descriptions des astres. Dans le premier ils sont quasi inexistants tandis que le deuxième en contient beaucoup, peu-être trop…
Dans les années 1990, Walter van Beek a remis en question les informations relatives à Sirius et ses compagnons.
Source principale : Masques dogons
Dans ce mythe il y a juste un épisode sur le soleil et la lune :”il existe un soleil et une lune ; le soleil est au-dessus des confins de la terre dont il n’éclaire qu’une partie, comme une lampe. Il est immobile”. et l’épisode sur les étoiles qui sont des jouets (voir cosmogonie).
Complément : Le Renard Pâle 
Renard pâle fourmille d’informations, parfois étranges…
• Voie Lactée
- yalu ulo, “Voie lactée de notre galaxie, qui résume l’ensemble du monde stellaire dont fait partie la Terre, lequel tourne en spirale” (p. 104)
• La spirale
Le mot “sprirale” revient à plusieurs reprises dans le Renard Pâle, alors qu’il est complètement absent des premières investigations de Griaule. Il est cité dans des extraits traduits et dans des commentaires, sous la forme d’un motif cosmogonique ou cosmologique :
- un motif cosmogonique (résumé du début du chapitre I) :
La spirale est au cœur de la création d’Amma, elle symbolise le dieu lui-même, l’énergie, le mouvement.
Après avoir créé et détruit un premier monde Amma en façonne un deuxième. Amma décide de ne plus superposer ses éléments mais de les mélanger. En son sein, dans l’œuf toujours divisé en 4 parties, Amma dessine les marques yala de l’univers, au nombre de 266 et anime une spirale au centre de l’œuf. Il ouvre les yeux, faisant sortir les yala de la spirale, inversant le sens de rotation de la spirale. La sortie des yala de la spirale les transforme en tõnu, annonçant la création des astres. Dans l’œuf d’autres yala, des jumeaux, inversent à nouveau le sens de rotation de la spirale, transformant la spirale en 7 “limites de l’espace”, yalu ulo.
“(…) le terme yalu ulo désigne la Voie lactée de notre galaxie, qui résume l’ensemble du monde stellaire dont fait partie la Terre, lequel tourne spirale. Le nombre 7 exprime la multiplication car il totalise 3 qui symbolise le sexe de l’homme et 4, le sexe de la femme.”
Amma, toujours au centre de l’œuf, “était lui-même comme un mouvement spiralant” créé la graine ovale de põ (fonio-digitaria exilis) et la dépose au centre. Cette petite graine, invisible, inaudible, contient la volonté créatrice d’Amma, puis sa parole. Puis Amma créé les 8 graines de céréale : ęmmę ya “mère des céréales” (sorgho femelle), ęmmę dī giru “œil de l’eau”, ęmmę pilu, ęmmę nakolo, ara gęũ (riz noir), yũ (mil), nũ (haricot), namu ī(cotonier. L’œuf s’est transformé en placenta double (même racine que cuivre) dans lequel les premiers êtres animés se forment, les Nommo anagonno, (silure), dotés de parole. Amma multilplie ses créatures, formant quatre paires de jumeaux mixtes : Nommo dię “grand Nommo” (reste au ciel près d’Amma, régisseur de l’atmosphère, de la pluie, se manifeste sous forme d’orage, d’arc-en-ciel (Nommo sizu “chemin de Nommo), Nommo titiyaynę “messager du Nommo” (protecteur et gardien des principes spirituels, sacrificateur), o nommo ‘nommo de la marre” (sera sacrifié à cause des actes néfastes de son jumeau, c’est lui qui sera rescuscité et descendra sur terre avec les premiers hommes sur une arche), nommo anagono ou Ogo, (c’est lui qui se révolte contre son créateur, introduira le désordre et se transformera en renard).
- un motif cosmologique :
Pour décrire le monde, la spirale revêt ici un sens plus fonctionnel, le motif sert à maintenir l’ordre du monde. Chose étrange, le motif se répète, à l’image des mondes  :
La Voie lactée est “l’image de la spirale des astres à l’intérieur du mondes d’étoiles en spirale où se trouve la Terre”. (p.321 + 169).
“L’ensemble des étoiles, celles qui font partie du monde d’étoiles en spirale où se trouve la Terre, visibles ou invisibles dans le firmament et celles qui font partie des autres mondes d’étoiles en spirales créés par Amma sont également en rapport avec l’ensemble des signes, expressions première de la pensée du Créateur. (…)”(p.466).
Il y a donc plusieurs mondes d’étoiles en spirales, le notre (celui où se trouve la Terre) et bien d’autres. En d’autres termes il y a une pluralité de mondes d’étoiles en spirales.
Plus loin, les anthropologues ajoutent “Le monde d’étoiles en spirale où se trouve la Terre, souligné par la Voie Lactée, tourne autour d’un axe théorique qui relie la Polaire, dū daga tolo “étoile du nord” à la Croix du Sud tenulu tolo “étoile du sud”, astres dits “yeux d’Amma”, lesquels soutiennent et surveillent le monde.” (p. 466).
“Le soleil tourne sur lui-même, comme sous l’effet d’un immense ressort en spirale. Renforcée par les “cordes” de pluie qui pénètrent en elle, la Terre tourne sur elle même et parcourt d’autre part un grand cercle adun
ǫ digili “cercle du monde”, comme une toupie dont la rotation est accompagnée d’un déplacement circulaire.” (p. 477)

• Etoiles
-”Les étoiles tournent dans le ciel. Les étoiles sont le signes inconnus d’Amma qui tournent dans le ciel”.
- Polaire : aduno girī, “œil du monde”, dū daga tolo “étoile du nord”
- Croix du Sud : aduno girī lẹy, “deuxième œil du monde”, enulu tolo “étoile du sud”
- Baudrier d’Orion : atānu tolo, “étoiles trois”
Groupe d’étoiles = “soutien de l’assise du monde”, témoins des signes maîtres et guides des 266 signes primordiaux :
- Sirius : sigi tolo, “étoile du Sigui”
avec ses compagnons, elles sont les “étoiles de la tête”
- 4 étoiles du chariot d’Orion : ami bogu tolo, “étoiles du nombril d’Amma”
- Pléiades : tôle
uo
- étoile du chevrier : ęnęgirinę tolo

• Sirius et ses deux compagnons
- Sirius : sigi tolo, “étoile du Sigui”
- premier compagnon de Sirius : põ tolo, “profond commencement” ou “étoile du folio”, révolution autour de Sirius en 50 ans.
“‘Amma a créé põ tolo la première de toutes les étoiles.”, et joue donc un rôle primordial dans la cosmogonie.
“Elle est la plus importante de toutes les étoiles”,
“(…) considérée comme le centre du monde stellaire”.
“Quand plus tard, ils (les hommes) la verront dans le ciel, elle leur sera un témoignage de renouvellement du monde”
“Elle est semblable à l’œuf du monde”, “considérée comme le réservoir, la source de toutes les choses. Elle est la plus petite, mais aussi la plus lourde des choses célestes”.
composée des éléments de base : air, feu et eau. avec un métal très lourd : “si l’on assimilait la dimension de son diamètre à celle d’une peau de bœuf étendu (…), elle pèserait aussi lourd que 480 charges d’âne (environ 35 000 kg)
Comme les autres étoiles elle s’est éloignée de la Terre (contrairement au soleil).
C’est le mouvement de põ tôlo qui maintient toutes les autres étoiles à leur place respectives.
“soutenant l’univers en tournant sur elle-même et autour de Sirius, on dit d’elle, qu’elle est le pilier des étoiles” C’est l’axe du monde entier.
- deuxième compagnon de Sirius : ęmmę ya tolo, “petit soleil des femmes”.
C’est le siège des âmes femelles. Plus volumineuse que põ tolo mais 4 fois plus légère. Elle met également 50 ans pour tourner autour de Sirius selon une trajectoire plus vaste (note  : “d’après une autre information, sa révolution serait de 32 années”).
Elle tourne pour transmettre les ordres de põ tolo à Sirius.
les autres étoiles sont les “étoiles du corps”
- lever héliaque de Sirius : conjonction des deux placentas initiaux. “Le lever héliaque de Sirius (…) et la révolution de põ tolo  (…) autour de cette dernière, seront associés à l’éxécution des cérémonies soixantenaires du Sigui qui commémorent actuellement à la fois la révélation e la parole aux hommes et l’apparition de la mort sur Terre.”

• Soleil et Lune
- Soleil : nay, “quatre”, chiffre féminin. Resté proche de la terre.
Il tourne sur lui-même, “comme sous l’effet d’un immense ressort en spirale”). C’est un reste du placenta d’Ogo (Le renard pâle). Distribue la lumière avec 22 rayons, répartis selon les points cardinaux.
“Il pousse le matin (…) il est alors le “soleil du levant”. Dans la journée il suit le “chemin de la chaîne de l’arche”. Quand il se couche on dit qu’il “est tombé dans l’arche”.
“Les deux mouvements apparents du soleil déterminent le jour (bay) et la nuit (digę), d’une part ; les solstices (dū daga nay “soleil du nord, te
ulu nay “soleil du sud”) et les équinoxes (nay logoron “soleil du milieu”), d’autre part.
C’est le génie Nommo qui le fait marcher d’est en ouest. Ses rayons sont des artères où circule le sang du placenta toujours qui nourrit la terre sèche.
- Lune : ie pilu, sèche et morte. Un sang impur y circule (cf sang des menstrues). Quand la lune est pleine c’est qu’elle a reçu le sang que lui envoie le soleil puis elle dépérit à nouveau. Les phases de la lune sont aussi associées à l’ouverture de la bouche du Nommo. La nouvelle lune (le Nommo se tait) est un moment défavorable où survient la mort. Le calendrier lunaire est le calendrier courant. La lune  marque le temps qu’ a mis Ogo pour arracher son placenta et former la terre. 2 mois = 60 jours correspondent aux 60 trous faits par Ogo dans son propre placenta.

• Planètes
Les planètes sont appelées Tole tãnaze, “étoiles qui traversent” ou “étoilent qui tournent”, par opposition aux étoiles fixes.
- Vénus : dana tolo, “étoile de la fontanelle”. 6 positions majeures sont observées au cours de l’année, un calendrier vénusien est ainsi associé à diverses activités humaines : agricole avec les étapes de germination, de développement, de récolte des céréales de base (mil).
Vénus est associée à plusieurs épisodes mythologiques majeurs : sacrifice de Nommo, circoncision du Renard. Les positions de Vénus sont liées à une série d’autels et de pierres levées rappelant les mythes primordiaux comme la circoncision d’êtres mythiques. Le calendrier n’est plus respecté pour la circoncision.
- Jupiter : dana tolo, “étoile de la fontanelle”
satellite de Jupiter : bala tolo, “étoile de l’arbre balā”
satellite de Jupiter : dana tolo, “étoile de la fontanelle”
satellite de Jupiter : gẹrẹllẹ tolo, “étoile du gẹrẹllẹ”
satellite de Jupiter : dana tolo, “étoile de la fontanelle”

• Important complément contradictoire : les recherches de Walter van Beek
Walter Van Beek a passé dix années auprès des Dogons dans les années 1980… et dans sa critique des méthodes de Griaule (valables pour Le Renard pâle et Dieu d’eau), il affirme plusieurs désaccords retentissants :
- les Dogons n’ont qu’une astronomie très rudimentaire.
- les Dogons n’utilisent pas les étoiles dans leurs rituels.
- les Dogons n’utilisent  que les positions du soleil et de la lune pour compter les jours.
- les Dogons connaissent bien Sirius mais l’appellent dana tolo.
- ses informateurs n’ont jamais entendu parler de Sirius comme une étoile double ou triple. Van Beek n’a donc pas retrouvé la trace du mythe de Sirius et de ses compagnons. Il a retrouvé Amadingue, un informateur qui avait travaillé avec l’équipe de Griaule, dont Ambara l’informateur principal… d’après Amadingue, Ambara  n’a jamais parlé en terme d’étoile-double ou triple mais “d’étoiles de différentes générations” (Sirius serait alors le grand-père, les deux autres le père et le fils). Les deux autres étoiles ne seraient que deux étoiles de la constellation du chien.
L'astronomie des Dogon

L'interprétation de Marcel Griaule  
Pour discréditer objectivement les théories extravagantes de Robert Temple, il faut revenir à Marcel Griaule et Germaine Dieterlen car les résultats de leurs recherches publiés entre 1950 et 1965 ont forgé la trame du livre de l'écrivain. Et nous verrons que les propos des deux ethnologues sont eux-mêmes affectés d'imprécisions linguistiques et d'une imprégnation culturelle antérieure que ni Temple ni Guerrier n'ont pris la peine de souligner.
Les travaux de Griaule et Dieterlen ne furent pas les seules sources documentaires consultées par Temple et Guerrier mais du fait que les deux ethnologues étaient a priori experts en leur domaine, cela renforçait leur crédibilité et le poids de leurs découvertes. Temple et Guerrier n'eurent plus ensuite qu'à compléter et enjoliver ces informations de manière ad hoc afin qu'elles cadrent avec le but qu'ils poursuivaient chacun.
Ainsi que nous l'avons dit précédemment, entre son livre "Le Dieu d'eau" (1948) et "Le renard pâle" (1965), l'interprétation de Marcel Griaule a sensiblement évolué et est même contradictoire d'un livre à l'autre. On ne peut donc pas déterminer sur la seule base de ces documents quelle est la traduction la plus correcte du texte dogon.
Un expert devrait donc se baser sur des travaux de linguistes connaissant la langue dogon et sigi so dans la mesure où Griaule reprend parfois le texte original dans les notes figurant en bas de page du second livre. Les extraits cités ci-dessous n'ont donc qu'une valeur relative, avant tout anthropologique et nullement d'ordre astronomique quoiqu'en pensent certains critiques et notamment Temple et consorts.

Les révélations du hogon Ogotommêli
Pour nous résumer, dans son livre Le Dieu d'eau : Entretiens avec Ogotommêli  publié en 1948, Griaule prétend avoir été initié en 1936 durant 33 jours par Ogotommêli. Cet ancien chasseur dogon devenu aveugle suite à un accident est devenu chef religieux ou hogon. Voilà qui est très intéressant car Griaule nous indique la source originale de ses informations, celles à l'origine de tous le dossier sur la cosmogonie dogon ! Profitons-en pour prendre quelques renseignements sur ce personnage central de notre dossier.
Comme toute cosmogonie ou tradition initiatique, celle des Dogon est un savoir uniquement réservé aux initiés, aux hogons , représentant l'autorité spirituelle. Il n'y en a qu'un par village (à Banani, Endé, Sangha, etc). Généralement, c'est l'homme le plus vieux du village qui devient hogon ("ôgô"). Son savoir est uniquement transmis à son héritier qui reçoit ses fonctions après avoir été intronisé. En aucune occasion ce savoir ne peut être divulgué à des étrangers ni même à la population; le hogon détient un savoir sacré réservé aux initiés et aux esprits.
Le hogon ayant un pouvoir sacré, personne ne peut le toucher ou lui serrer la main, pas même les membres de sa famille ou des étrangers. C'est le dignitaire le plus respecté de la société dogon, avant même le chef de tribu du fait de son ascendance spirituelle. C'est le hogon par exemple qui peut accuser un habitant de sorcellerie ou user de ses pouvoirs pour déclencher la pluie.
Le hogon obéit donc également à des lois terrestres. Il doit notamment respecter un voeux de chasteté et il ne sortira plus de l'enceinte de sa maison jusqu'à sa mort. Il y reçoit toutefois des visiteurs et y tient des réunions.
Ogotommêli appartenait à une ethnie Dogon vivant dans l'ouest du pays. Bien que les tribus dogons ont chacune leur dialecte, il parlait sigi so, la langue initiatique et rythmique réservée à la "Société des masques" (Awa). Etant donné qu'un sage ne discute pas avec un étranger de choses sacrées, Griaule devait occuper un statut particulier dans leur société (celui d'un Occidental se documentant sur les Dogon à titre scientifique) pour prétendre bénéficier du savoir du hogon. Ogotommêli devait également sans doute considérer que Griaule ferait bon usage de ses connaissances qui risquaient peut-être un jour de disparaître car, comme le disait le poète africain Amadou Hampâté Bâ avec lequel travailla Marcel Griaule, lorsque qu'"un homme meurt c'est une bibliothèque qui brûle".
Dans l'esprit d'un ethnologue découvrant une population méconnue, avoir le privilège d'enregistrer les commentaires d'un hogon peut donc lui procurer autant de satisfaction que de gagner le prix Nobel ! On comprend donc facilement qu'après avoir enregistré tout ce que lui disait ou dessinait Ogotommêli sur la terre, Griaule devait être exalté et devait absolument publier ses découvertes, d'autant qu'elles étaient littéralement extraordinaires ! C'est donc à partir de ses entretiens qu'en 1936 Griaule publia son premier livre "La Cosmogonie des Dogon", un livre aujourd'hui passablement introuvable mais dont on retrouve heureusement le contenu dans le "Le Dieu d'eau" publié douze ans plus tard et toujours en vente.
C'est ainsi qu'Ogotommêli aurait décrit à Griaule des notions d'astronomie que seul un Occidental pouvait connaître ou alors, si les hogons ne les apprirent pas d'un Européen en visite ou de leurs ancêtres, ils furent témoins d'une rencontre d'un troisième type... Mais Griaule n'était pas là pour s'étendre sur cette question. Il était déjà étonnant que ce sage accepte de lui raconter ces légendes sacrées. Tel fut le contexte socioculturel dans lequel travailla Griaule et les ethnologues qui l'accompagnèrent.
Avant de décrire cette cosmogonie, il faut préciser un détail très important à propos de la façon de travailler de Griaule et Dieterlen et dont les critiques oublient souvent de tenir compte et de rappeler car ils ne maîtrisent tout simplement pas leur sujet.
Si Marcel Griaule et Germaine Dieterlen ont appris le dialecte dogon au fil des années, ils n'ont en revanche jamais pris la peine d'apprendre le sigi so, langage secret réservé à la Société des masques. Or, si une personne veut comprendre la vie sociale et spirituelle des Dogon et donc correctement décrire leur cosmogonie, il faut impérativement qu'elle apprenne le dialecte réservé aux initiés. Or Griaule s'exprima essentiellement en français et parfois en dogon lors de ses contacts personnels avec cette tribu. Difficile dans ces conditions d'avoir un jugement objectif sur le sujet.
Dès 1929, Marcel Griaule fit appel aux services de Michel Leiris , homme de lettres et étudiant en ethnologie qui sera à son service comme secrétaire-archiviste de la Mission ethnographique et linguistique Dakar-Djibouti. Leiris enquêta sur les sociétés d’enfants, les sociétés séniles et les institutions religieuses. Leur collaboration dura jusqu'en 1940. Leiris essaya également de publier un article sur les Dogon dans le "Journal de la société des africanistes" en 1940, mais sans succès selon l'éditeur Jeau Jamin. Ce dernier publiera néanmoins son article en 1998 à l’occasion de la mort de Denise Paulme sous le titre "Organisation sociale des Dogon "[4].
Après le départ de Leiris, n'ayant  encore qu'une maîtrise imparfaite du dialecte dogon, Griaule dut faire appel à de jeunes interprètes locaux qui lui servaient également de guide à travers les villages qu'il visitait et lui traduisaient du mieux qu'ils pouvaient les propos tenus en dogon et sigi so. Si la méthode est rapide et aisée, elle laisse planer un sérieux doute sur l'authenticité des traductions.
Ainsi que nous l'avons dit d'une autre manière à propos des Hogons, dans un article publié en 1991 dans le magazine "Current Anthropology ", l'ethnologue Walter E. Van Beek de l'Université d'Utrecht expliqua que cette manière de travailler a conduit à la "création collective d’une culture dogon mystagogique", c’est-à-dire une culture gouvernée par les pratiques initiatiques dont les véritables secrets n’étaient connus que de quelques initiés de la Société des masques. On ignore à quelle époque précise ces rites se sont développés mais des indices d'imprégnation culturelle sur lesquels nous reviendrons indiqueraient que cette culture cosmogonique se développa surtout à partir de la fin du XIXeme siècle, à l'époque de la colonisation du Macina. Nous verrons plus loin les raisons de cette hypothèse.
C'est ainsi que dans un livre publié en anglais en 1954 dans une collection consacrée à la cosmogonie des peuples africains et intitulé "The dogon of the French Sudan"[5], Griaule et Dieterlen écrivent que les Dogon prétendaient avoir découvert "un ensemble logique de symboles exprimant un système de pensée qui révèle à l’étude une cohérence interne, une sagesse secrète, et une appréhension des réalités ultimes égales à celles que nous, européens estimons avoir atteint."


par Walter E. A. van Beek et Jan Jansen, Cahiers d'études africaines (158, 2000)
Ce sont ces "réalités qui révèlent une sagesse secrète" que nous allons examiner et constater à quel point elles sont "originales". Elles sont en fait trop particulières, et du fait de leur profil atypique signent également la griffe de l'auteur ou du moins les traces de son passage. Encore faut-il pouvoir l'identifier...
Critique de la cosmogonie dogon telle que retranscrite par M.Griaule
Les compagnons de Sirius
Parmi les récits les plus surprenants, Ogotommêli expliqua à Griaule les secrets qui se cachaient derrière Sirius qu'il appelle "Sigi tolo" ou profond Sigi ou encore l'étoile de Sigi et ses deux compagnons invisibles appelés "Pô tolo" ou profond commencement ou petit Sigi (Sirius B) et "emma ya tolo" ou l'étoile de fonio (Sirius C)[6]. Notons que Sirius B est également traduit par "Pô Digitaria" ou commencement de digitaria (germe ?) par référence à une graine de céréale commune, petite et lourde.
Ogotommêli nous dit Griaule, m'a expliqué que : "Lorsque Digitaria (Pô tolo) est près de Sirius, ce dernier devient plus brillant; lorsqu'il est le plus distant de Sirius, Digitaria présente un effet de scintillement, suggérant l'existence de plusieurs étoiles à l'observateur".
On peut déjà relever plusieurs imprécisions dans le texte retranscrit par Griaule. Tout d'abord, ainsi que nous venons de l'expliquer, les ethnologues ayant travaillé avec Van Beek considèrent qu'il n'est même pas certain que la traduction soit correcte ! Les différentes positions de "Sigi tolo" (Sirius) feraient en réalité référence aux différentes positions de Vénus. Ce que certains interprètent comme une "étoile invisible" (Sigi) pourrait annoncer l'approche d'un festival que l'on appelle les "cérémonies du Sigi" (ou Sigui). On y reviendra.
Comme beaucoup de textes mystiques, en réalité le texte original est trop imprécis et ambigu pour en dire plus. En fait, il faut savoir qu'il est en réalité conforme au style de narration de certaines tribus dogons. De plus chacun sait que les mythes et textes sacrés peuvent être interprétés par chacun et ajouter à la confusion entre les experts. Ce problème pèse déjà d'un poids certain dans l'interprétation du texte. Et nous verrons que cela va s'accentuer quand Griaule décrira en détail le système de Sirius.
Selon Peter James et Nick Thorpe, rien ne prouve non plus dans ces propos qu'il s'agit d'un système binaire; "Pô tolo" peut très bien être une étoile ordinaire proche de Sirius. 
Selon Van Beek, pour les Dogon l'étoile la plus brillante du ciel (Sirius) s'appelle "Dana Tolo" et non pas "Sigi Tolo" comme le prétend Griaule. Cela pourrait bien entendu modifier le sens des commentaires.
Enfin, Peter James et Nick Thorpe confirment à leur tour qu'au cours de leur enquête "seules les personnes informées par Griaule avaient entendu parler de Sirius B".
Les caractéristiques de Sirius B selon les Dogon
Si nous étions enclins à interpréter ce que nous dit Ogotommêli comme l'ont fait et continuent à le faire des enquêteurs peu scrupuleux envers la vérité scientifique, qu'il nous dise qu'une petite étoile orbite autour de Sirius pourrait encore être considéré comme le fruit du hasard sachant que trois étoiles sur quatre dans l'univers sont agencées en systèmes multiples.
Mais il y a une énigme autrement plus pertinente, c'est la question des caractéristiques physiques de "Pô tolo", Sirius B. Ogotommêli semble dire que le Sigi se produit tous les 50 ans. Dans son livre "Le renard pâle" p472 et suivantes, Griaule interprète le récit du Hogon de cette façon : "L’étoile du fonio tourne autour de Sirius. La durée de la révolution est de cinquante années. Elle est la plus importante de toutes les étoiles, celle dont le rôle est magistral - pour l'ensemble de tous les mondes spiralants d'astres formés par Amma". 
Un peu plus loin il précise que "pô tolo est la plus petite de toutes les choses; elle est l'étoile la plus lourde. L'étoile contient trois éléments de base « air, feu et eau », l'élément « terre » est remplacé par le métal sous toutes ses formes, notamment par celui qui est nommé  « sagala » (fort ou lourd en sigi so), un peu plus brillant que le fer et d'une densité telle que", et il cite Ogotommêli, « tous les êtres terrestres réunis ne pourraient en soulever une parcelle »."
Enfin, Griaule discute de l'équilibre du système binaire : "la place primitive de l'astre dans l'espace est celle où se trouve actuellement le soleil [...] et occupe actuellement le centre du ciel; mais elle est un centre en mouvement [...]. Ce sont ces mouvements de pô tolo qui maintiennent toutes les autres étoiles à leurs places respectives : on dit en effet que sans ce mouvement, aucune d'elles ne pourrait « tenir ». C'est pô tolo qui les contraint à conserver leur trajectoire : elle règle notamment celle de Sirius qui est la seule à ne pas suivre une courbe régulière et qu'elle sépare des autres astres en l'entourant de sa propre trajectoire."
Voilà vous en conviendrez une traduction libre très occidentale d'un texte initiatique dogon ! Remanié et réinterprété, sa valeur scientifique est nulle. C'est à partir de ce genre de traduction littéraire que Temple et Guerrier en sont arrivés à la conclusion que les Dogon avaient découvert la période orbitale de Sirius B et qu'elle était constituée de "sagala", d'une matière hyperdense, comme le sont effectivement toutes les étoiles naines (leur densité ou masse volumique théorique varie entre 0.01-1000 tonnes /cm3).
Du fait de l'ambiguïté du texte original, pendant quelques années les chercheurs, ethnologues principalement, ont cru que les cérémonies du Sigi se déroulaient tous les 50 ans jusqu'au jour où ils découvrirent qu'elles se produisaient tous les 60 ans ! Elles se déroulent chaque fois dans un village différent et s'étendent sur 7 ans. Elles eurent lieu en 1907 puis entre 1967 et 1974. Ces dernières furent filmées par Jean Rouch . Les prochaines cérémonies Sigi auront lieu à partir de 2027. Mais du fait même le Sigi n'avait plus aucune relation avec un événement astronomique, ou du moins pas avec la soi-disant période orbitale de Sirius B ! En d'autres termes, il fallait trouver une autre interprétation !
En revanche, selon Ogotommêli les cérémonies du Sigi commencent durant la période caniculaire (relative à Sirius), concrètement au mois de juin, lorsque "Sirius est occulté par l'une de ses planètes invisible à l'oeil nu".
Là nous aurions bien mis Ogotommêli au défi de nous dire comment savait-il quand allait commencer les cérémonies puisqu'il ne voyait pas l'occultation de Sirius à l'oeil nu et qu'il y avait un décalage de 10 ans entre le Sigi et la période de Sirius B... Il y a quelque chose d'incohérent dans ses propos, comme si de fait une information extérieure avait accidentellement contaminé le récit original (ou que toute la légende était née dans son esprit).
L'astronomie des Dogon
Pseudoscience et contamination culturelle (I)

 Vous avez probablement déjà entendu parlé ou même lu des articles ou des livres sur l'extraordinaire astronomie des Dogon, en particulier leur description du système de Sirius.
Découvertes notament par des éthnologues, les connaissances en astronomie des Dogon sont a priori trop en avance sur leur culture propre. 
Ce paradoxe incita le Français Eric Guerrier, auteur du livre "La cosmogonie des Dogon: L'Arche du Nommo " à faire appel à une théorie extraordinaire plutôt que rationnelle pour expliquer leur cosmogonie atypique. Pour sa part, l'Anglais Robert Temple, auteur du livre "The Sirius Mystery " prétendit que les Dogon avaient été en contact avec des extraterrestres, appuyant sa théorie avec de soi-disant preuves.
De fait, cette énigme a longtemps préoccupé les scientifiques car durant plus d'un demi-siècle, mis à part une poignée d'ethnologues et d'astronomes, très peu de chercheurs se sont réellement penchés sur la question, ce qui n'a fait qu'amplifier la rumeur et les spéculations autour de l'origine des connaissances des Dogon.
Avant d'approfondir le sujet et tenter de résoudre cette énigme, commençons par décrire le pays et le peuple que nous allons étudier.

L'astronomie des Dogon
Comme tous les peuples observant le ciel à l'oeil nu, les agriculteurs Dogon ainsi que les chefs religieux ne connaissaient que les cinq planètes visibles à l'oeil nu et les étoiles brillantes.
 Or, sans les connaissances intellectuelles et technologiques de nos civilisations, leur mythologie semble parler des quatre satellites de Jupiter, de l'anneau de Saturne, de la forme sphérique de la Terre, de la position centrale du Soleil, des orbites elliptiques des planètes, des phases et des cratères de la Lune, d'un satellite de Vénus, de la structure spirale des galaxies et le fait que nous étions dans l'une d'elles, proche du système intérieur des étoiles d'Orion, de Sirius et des Pléiades, bref comme le disent les astronomes dans le bras intérieur d'Orion.
Plus étonnant, ils auraient découvert les particularités du système binaire de Sirius (l'étoile naine Sirius B) et observé son changement de couleur, phénomène qui fut soi-disant également consigné dans les annales chinoises.
Quel crédit faut-il accorder à ces découvertes ? Info ou intox comme le dirait un célèbre animateur ? Poser la question revient à suspecter un défaut d'analyse. Pour éclaircir la question et tenter de résoudre cette véritable énigme scientifique, nous allons étudier les origines historiques du phénomène, tant dans les sources littéraires qui l'ont lancé que dans les observations consignées par les ethnologues à propos de la cosmogonie dogon et analyser en parallèle l'histoire culturelle du Mali.
C'est un véritable devoir d'enquête pluridisciplinaire que nous allons effectuer, un voyage passionnant à travers le temps et l'histoire des découvertes qui nous conduira de la maison initiatique des chefs religieux dogons aux observatoires orbitaux en passant par les compagnes d'Egypte de Bonaparte et les missions des premiers ethnologues.

Enquête sur un mythe moderne
Si nous voulons analyser la question de manière objective et porter un jugement critique sur le sujet, a priori la cosmogonie dogon rapporte des faits mystérieux et paradoxaux. En effet, la période de révolution et la densité d'une étoile naine ne s'inventent pas - ou plutôt exigent une démonstration très étayée - ni l'explication de l'anneau de Saturne, des orbites elliptiques ou la structure spirale des galaxies.

Dès la découverte de ces informations les ethnologues et des astronomes considéraient que cette vision mythologique méritait d'être étudiée. Dans son livre "Silence au point d'eau " publié en 1988 et consacré à la bioastronomie, l'astronome Emmanuel Davoust de l'Observatoire Midi-Pyrénées de Toulouse discute de la cosmogonie dogon et suggère : "Il faudrait la comparer [...] avec l'Universalité musulmane de Tombouctou au XVIeme siècle". 
En effet, située à environ 200 km au nord du pays dogon (17°N, 3°O), Tombouctou fut entre le XVeme et le XVIeme siècle un centre islamique très important et sera la cité la plus savante du Soudan.

On peut toutefois se méfier de comparer la culture Dogon avec celle de Tombouctou quand on connaît le passé international de cette contrée.

Fondée en 1100 par les Touaregs, la cité islamique subit de nombreuses influences : touareg, songhoy, marocaine, peul, française, etc. Mais les connaissances astronomiques des Arabes n'ont pas été (officiellement) transmises aux Dogon du fait que cette tribu réputée pour son indépendance d'esprit s'est justement isolée à Bandagiara pour échapper à l'influence musulmane (et plus tard à celle de l'évangélisation, mais les pères blancs n'ont pas insisté).
Emmanuel Davoust conclut néanmoins avec prudence, "Mais comme pour les OVNI, nous refusons d'invoquer une intervention extraterrestre à défaut de trouver d'autres explications satisfaisantes". Que les ufologues l'entendent !
A partir des années 1980 de nombreux chercheurs, scientifiques, journalistes, historiens, etc, ont enquêté sérieusement sur la question et ont fini par trouver l'explication. Pour maintenir le suspens jusqu'au bout, nous ne présenterons les conclusions de leurs enquêtes qu'à la fin de cet article. On peut toutefois déjà dire qu'elles sont plus terre à terre que la théorie extraterrestre de Robert Temple et détruisent avec elles tout un mythe.
Nous allons décrire les différents faits qui ont forgé cette histoire en remontant le cours du Niger jusqu'à Bandiagara et celui de l'Histoire vers les sources de la polémique. Nous rappellerons tout d'abord les principaux résultats des recherches de Griaule et Dieterlen ainsi que la petite histoire du livre de Temple. Nous nous pencherons ensuite sur les sources documentaires dont s'est inspiré Temple pour rédiger son livre avant de critiquer les sources elles-mêmes et de tenter d'expliquer l'origine de cette cosmogonie très originale.
 Le mystère des Dogons
La cosmogonie de Dogons
  D'abord il faut savoir que ces Dogons prétendent, en premier lieu, connaître depuis longtemps deux étoiles compagnes de Sirius qui est l'étoile la plus brillante du ciel et que l'on peut voir, en début de Février presque au dessus de notre tête, en Guadeloupe vers 20 heures. Mais à l'œil nu, on ne peut apercevoir qu'une seule étoile et ce n'est qu'en 1862 que, l'astronome américain Alvan CLARKE découvrit, grâce à un télescope puissant, la deuxième étoile qui fut nommée alors: Sirius B .
  Cependant les Dogons eux affirment qu'il existe une troisième étoile, que nous pourrions nommer Sirius C, et ils nous disent surtout que leurs ancêtres seraient justement venus, il y a des millénaires, d'une planète en orbite autour de cette troisième étoile que nous ne connaissons pas encore.

 Mais voyons plus en détail ce que nous disent à ce sujet les Dogons. Ils affirment que Sirius possède d'abord un compagnon plus petit et surtout plus lourd qu'ils nomment PO Tolo ou Po-Digitaria du nom d'une graine de céréale, africaine très petite et très lourde qu'ils utilisent régulièrement. Mais surtout les Dogons savent que Sirus B donc Po-tolo boucle son orbite elliptique autour de Sirius A en 50 ans et c'est pour cela que ces Dogons célèbrent tous les cinquante ans, la " fête de Sigui " dont les cérémonies visent à régénérer le Monde, d'où son importance, sans doute pour que les récoltes soient bonnes. Or c'est d'abord l'allemand Bessel qui fut le premier, en 1844, à soupçonner l'existence de cette 2ème étoile, pour expliquer les oscillations insolites du mouvement apparent de Sirius A, alors que l'orbite théorique de cette étoile Sirius B, on le sait, invisible à l'œil nu, fut calculé par Peter en 1851 et sa période de révolution fut précisé de 50,090 ans par Van Den Bas en 1960. Or les Dogons le savaient déjà eux, et comment ont-ils su que la période de révolution était justement de 50 ans.

  Cette étoile Sirius B est ce que l'on appelle une "naine blanche". Elle est plus vieille que Sirius A, mais ne mesure que 30 000 Km environ de diamètre, donc 2 fois et demi celui de la Terre et sa densité est de 50 000 alors que sa masse atteint 90% de celle de notre Soleil. Mais que dire de cette troisième étoile Sirus C que les Dogons affirment connaître? Ils la nomme Emma Ya " ou"Sorgo" ou encore "L'étoile des femmes" et ils disent que cette étoile a une période de révolution de 32 ans autour de Sinus A, surune orbite elliptique très excentrique et qui est, (et cela est plutôt remarquable comme prècision)perpendiculaire à celle de Sirus B. Les Dogons, qui ont dessinés ces orbites sur leur objets précieux sans doute pour mieux les visualiser, affirment surtout que Emma ya, possède plusieurs planètes en orbite autour d'elle et que c'est de l'une de ces planètes, que seraient venus leurs ancêtres, il y a très longtemps à bord du NOMO vaisseau inter-stellaire dont la forme et le comportement ressemble beaucoup à ceux de la fusée lunaire Apollo.

  En ce qui concerne les recherches des astrophysiciens sur cette étoile Sirius C, en 1991 dans la revue "Astronomy & Astrophisics" , les astronomes, Jean Marc Bonnet-Bidaud et Cécile Gry nous disent qu'ils en soupsonnent l'existence par suite de la constatation d'un changement de couleur du système, à travers les ages, et pensent que cet hypothétique troisième compagnon de Sirius pourrait bien avoir une orbite très aplatie comme une comète et après analyse grâce à un coronographe occultant la lumière aveuglante de Sirius A, ils ont sélectionné deux d'entre ces corps voyageurs sans arriver encore à déterminer lequel de ces astres montre le même mouvement propre que Sirius. Cependant dès les années 1920 une demi-douzaine d'astronomes rapportèrent l'observation d'une 3ème étoile très faible susceptible d'appartenir au système , mais aucune confirmation n'a pu émerger jusqu'alors.
  Les derniers travaux menés par les astronomes jean-Louis Duvent et Daniel Benest de l'observatoire de Nice qui utilisèrent des simulations numériques d'ordinateurs, semblent renforcer l'hypothèse de l'existence du 3ème corps d'une masse très faible, de0,5 fois au plus la masse solaire et de magnètude apparente de 5 à 10 fois plus faible que Sirius A. (Voir la Revue CIEL ET ESPACE d'Août 1995, Article d'Olivier FEVRE "L'énigme de Sirius" et voir aussi l'article " Les étoiles du sacrifice" de Serge Jodra dans le n° 331 de la même revue de Mai 1996 .)

  D'ailleurs les Dogons ont également d'autres connaissances astronomiques toutes aussi étonnantes de la part d'une tribu arriérée qui vit au centre d'Afrique et pratiquement sans contact extérieur. Ils connaissent les différentes phases de Vénus, qui sont à peu près analogues à celles de la Lune et ils ont donné 6 noms différents aux divers aspects que présente, d'après eux, cette planète comme s'ils avaient su comment faire pour l'observer de l'extérieur . D'autre part, ils divisent le Ciel en 22 parties égales et en 266 constellations et ils disent aussi que Venus possède un compagnon, qui pourrait être sans doute l'astéroïde Toro, récemment découvert entre la Terre et Vénus. Ils connaissent aussi les 4 plus gros satellites de Saturne pourtantinvisibles à l'œil nu, mais ils ignorent cependant les planètes au delà de Saturne donc Uranus, Neptune et Pluton alors qu'ils connaissent les compagnons stellaires de Sirius . Il est donc évident que ces Dogons n'ont pas pu , par eux même, acquérir leurs connaissances et ils ne peuvent en avoir eu la révélation, que par des initiateurs cosmiques.
  Les Dogons prétendent aussi que tout l'Univers tourne en spirale conique et qu'il a été créé à partir d'un noyau central par la voix d'AMMA leur dieu suprême et cela ressemble assez à ce qui est dit dans la Bible tel qu' "Au commencement était le Verbe de YaHWeH". Pour eux l' Univers est infini, mais cependant mesurable, ce qui rejoint les théories d'Einstein et de plus, ils croient que les mondes infinis s'éloignent de nous à des vitesses très grandes dans un mouvement spiralé donc par unecombinaison de translations et de rotations, combinaison qui se retrouve aussi bien disent-ils dans les structures élémentaires infiniment petites que dans celles infiniment grandes et nous voyons là qu'ils anticipent ainsi sur les conclusions les plus modernes concernant l'expansion et la structure de notre Univers.
   La tradition des Dogons , que nous raconte le prêtre OGOTEMMELI, dit aussi que leurs ancêtres étaient des amphibiens et c'est pour cela qu' ils célèbrent l'anniversaire de leur arrivée sur Terre sous le nom de "jour du Poisson" et cela fait encore penser à la tradition Sumérienne qui nous parle d'OANNES l'homme poisson qui apparut à plusieurs reprises sur les plages du Golfe Persique pour civiliser et éduquer les hommesLe NOMO était rouge comme le feu quand il atterri au Nord-est du pays, dans un tourbillon de poussière, puis il fut traîné dans une dépression remplie d'eau et il put ainsi flotter. Puis les astronautes amphibiens sortirent de la capsule. D'ailleurs l'eau joue un grand rôle chez les Dogons qui considèrent que l'eau douce est de nature masculine et l'eau de mer de nature féminine que cette eau est la force vitale de la terre, force qui se trouve même à l'intérieur de la pierre car l' humidité est partoutNOMO, qui désigne aussi le Commandant du vaisseau, est descendu sur la terre, porteur de fibres végétales tirées des plantes qui poussaient déjà dans les "champs du Ciel" et après avoir créé la Terre, les plantes et les animaux, il créa le premier couple humain, qui engendra par la suite, les huit grands ancêtres de l'Humanité. Sa tâche terminée, Nomo regagna le Ciel.
  Ceci se rapproche, on le voit , de beaucoup d'histoires connues, et on découvre bien ici, que les Dogons savent qu'il existe des Terres cultivées ailleurs, dans le ciel, alors qu'il n'y a pas bien longtemps en 1772 certains savants dont le grand chimiste Lavoisier, pensaient que les météorites ne pouvaient tomber du ciel car d'après eux, "il n'y avait pas de pierres dans le ciel".Mais ce sont les révélations sur l'eau, que nous raconte ce prêtre dogon, qui sont encore plus surprenantes, quand on sait que la science actuelle n'a que récemment découvert la possibilité d'obtenir de l'eau à partir de la roche du sol, en voulant optimiser les possibilités de survie des hommes qui pourraient séjourner sur la Lune pour de longues périodes et cela extrayant de ces pierres lunaires, à l'aide de procédés très pointus et onéreux, l' hydrogène et l' oxygène à l'origine de la molécule d'eau.
La mythologie dogon

Selon la mythologie dogon amma dieu suprême, créa la terre et en fit son épouse. Une termitière, clitoris de la terre, se dressa en rivale du sexe mâle, et Amma dut l’abattre. Un fils unique naquit, Yurugu ou le Renard pâle. La terre excisée fut plus docile à son époux et mit au monde le Nommo, à la fois mâle et femelle, couple idéal, maître de l’eau et de la parole. Le Renard pâle, unique et donc imparfait, principe de désordre, commit l’inceste avec sa mère parce qu’il ne trouvait pas de compagne, et c’est alors qu’apparut le sang menstruel, impur parce que signe de stérilité. Errant sans cesse à la recherche d’une épouse, il ne connaît que la première parole, celle qu’il révèle aux devins. Amma façonna avec de l’argile un couple humain, qui devait donner naissance aux huit ancêtres. Nommo leur enseigna la parole, liée à l’humidité, ainsi qu’au tissage car elle est faite de questions et de réponses entrelacées.
La cosmogonie Dogon est extrêmement riche, bizarre et compliqué. On s'est plongé dans le bouquin de Marcel Griaule Dieu d'Eau. En voici, d'après ce qu'on a compris les grandes lignes.
Les dogons sont animistes. Néanmoins, comme souvent il y a un seul Dieu à l'origine : Amma. Celui-ci se désintéresse du monde qu'il a créé.
Création du monde.

Avec de la glaise, le dieu unique fabrique un corps de femme, allongé face au ciel.
Une fourmilière est son sexe, une termitière son clitoris
"Une fourmilère est son sexe, une termitière son clitoris"
La maladresse originelle de Dieu
Le Dieu veut s'unir à elle. Mais la termitière se dresse et empêche cette union.
Dieu abat la termitière et peut ainsi s'unir à la terre excisée.
De cette union contrariée, naît le chacal.
Naissance des jumeaux.
Plus tard, l'union de dieu et de la terre donne naissance à deux êtres, de corps vert et lisse, glissant comme une surface d'eau, sans articulation. Ce couple de jumeau est eau, il est parfait, force de Dieu. C'est le Nommo.
"Par ces fibres pleines d'eau et de paroles, le Nommo était donc continuellement présent devant le sexe de sa mère."
La première parole.
Les jumeaux voyant la nudité de leur mère, décident de lui fabriquer un vêtement. Ils tressent. Et dans les tresses, les jumeaux insufflent la parole par leur souffle divin. La parole, à la fois verbe et humidité, est léguée aux hommes par le biais d'une technique. Elle est frustre et sa syntaxe élémentaire.
Le viol.
Le chacal veut s'emparer de la parole. Il tente d'arracher son vêtement à sa mère. Celle-ci résiste devant ce geste adultère.
"Elle s'enfonça dans son propre sein, dans sa fourmilière sous l'apparence d'une fourmi. Mais le chacal la suivait; il n'y avait d'ailleurs pas d'autres femmes à désirer dans le monde. Le trou qu'elle forait n'était jamais assez profond. Finalement, elle dû s'avouer vaincue."
Le chacal obtient la première parole et pourra dans l'avenir communiquer aux devins les desseins divins. (Cf. tableau du renard)
Les menstruations des femmes rappellent cet événement.
Dieu se détourne de son épouse qu'il juge souillée et crée les hommes : les 8 ancêtres.
"Elle s'enfonça dans son propre sein, dans sa fourmilière sous l'apparence d'une fourmi."
"Le tissage étant une parole, fixant la parole dans le tissu par le va-et-vient de la navette sur la chaîne, la culture par le va-et-vient du paysan sur les parcelles, fait pénétrer le verbe des Ancêtres, c'est-à-dire l'humidité dans la fibre et dans la terre travaillée, fait reculer l'impureté et étend la civilisation autour des lieux habités"
La deuxième parole
Le Nommo pénètre dans la fourmillière, sexe de sa mère : sa présence humide, lumineuse et parlante la purifie du sacrilège du chacal.
Puis chacun à leur tour les ancêtres entrent dans la fourmilière par une anfractuosité du sol. Ils sont régénérés et peuvent monter au ciel. Mais pour le septième les choses se déroulent différemment :
"Il occupa lentement tout le volume de l'organisme : ses lèvres se confondirent avec les bords de la fourmillière qui devint bouche et s'épanouit. Des dents appointées surgirent. (...) Le septième ancêtre expectora 80 fils de coton".
Il se sert ensuite de sa mâchoire comme une machine à tisser. A travers cette technique et dans la bande du tissu sont transmises les paroles de l'ancêtre : C'est la deuxième parole léguée aux hommes. Elle est plus évoluée et marque un changement dans l'habitat et le mode de vie de l'homme.
L'arrivée sur terre.
Au ciel, les ancêtres se disputent (rupture de parole) et doivent descendre sur terre.
Un des ancêtres vole un morceau de soleil sous forme de braise et de fer incandescent. C'est le forgeron. Il descend sur terre sur un arc-en-ciel avec un grenier et les représentants des animaux.
Le forgeron est un génie d'eau : il est pourvu de 4 membres souples comme des serpents. Mais au moment de l'impact, sa masse et son enclume lui échappent des mains et lui brisent bras et jambes. C'est l'apparition des articulations. "En vue du travail,
"Le pagne est serré, dit-il, pour qu'on ne voie pas le sexe de la femme. Mais il donne à tous l'envie de voir ce qui est dessous. C'est à cause de la parole que le Nommô a mise dans le tissu. Cette parole est le secret de chaque femme et c'est cela qui attire l'homme. Il faut qu'une femme ait des parties secrètes pour qu'on la désire."
"Etre nu,
c'est être sans parole."
"Pourquoi ment-on aux hommes ? Pour mieux leur faire comprendre les choses..."
La troisième parole.
Le septième ancêtre se transforme en serpent et vole les graines de mil. Le forgeron le tue, coupe sa tête qu'il enterre sous l'enclume.
Dans le même temps, un vieil homme de la huitième famille meurt.
Alors que le forgeron tape sur l'enclume en cadence le septième ancêtre nage jusqu'au corps du vieillard, l'avale, le déglutit, le regénère et vomit dans un torrent d'eau le produit de la métamorphose.
Il rejette des pierres qui expliquent aux hommes l'organisation sociale basée sur le modèle du corps humain.
De cette association apparaît un neuvième "Leurs âmes sont jointes tout en restant distinctes, elles ne se séparent jamais." C'est ce neuvième qui va donner la 3è parole avec le tambour. Cette parole marque le début d'une véritable organisation de la société fondée sur le travail et la communauté.
L'histoire est en fait beaucoup plus compliqué : On fait croire aux hommes que le septième est mort, que le vieil homme est mort.
- Mais pourquoi ment-on aux hommes?
- Pour mieux leur faire comprendre les choses.
Notes
 Pour approfondir vos connaissances je vous suggère de lire "le dieu d'eau", "les dogons notion de personne et mythe de la création" et "le langage de la danse chez les dogons" que vous trouverez dans les bonnes librairies négro africaines. De plus  Ce sont deux ethnologues français , Marcel GRIAULE et Germaine DIETERLEN qui après avoir été initiés par un prêtre Dogon en 1946, publieront après 4 ans d'enquêtes en 1951 une étude dans le journal de la " Société des Africanistes" sous le titre: " Un système soudanais de Sirius", suivi d'un ouvrage intitulé "Le renard pâle" sous-titré " le mythe cosmologique , travaux et mémoire de l'Institut d'Ethnologie à Paris" où ils ont fait le récit de ce que leur a dévoilé, ce prêtre sur la vision des Dogons de l'Univers et ce qu'ils ont raconté alors, était tellement extraordinaire, que personne ne voulut les croire.
L’école d’ethnologie française, dirigée par Marcel Griaule, se passionne pour ce peuple d’agriculteurs dont les traditions révèlent une culture complexe. Toute une génération d’ethnologues et d’écrivains se forme dans le sillage de Griaule au cours de plusieurs missions : Germaine Dieterlen, Denise Paume, Solange de Ganay, André Schaeffner ou encore Michel Leiris (2). Les ethnologues, aidés de leurs informateurs, recueillent des mythes auprès des vieux sages, assistent à des sorties de masques, etc. Ces observations donneront lieu à de nombreuses publications scientifiques, et à la diffusion de reproductions de masques et de mythes romancés auprès du grand public.


SOURCES:

http://sergegrah.centerblog.net/5890462-LES-DOGONS-COSMOLOGIE-ET-MYTHES